Autre surprise : l’impact touristique. Depuis 2023, les communes de Guipry-Messac et de Saint-Jean-sur-Vilaine proposent des “randonnées castor”, encadrées par des guides naturalistes. Les visiteurs observent les barrages, les traces de dents sur les troncs, les glissières dans la boue — et parfois, au crépuscule, l’animal lui-même. Ces sorties, limitées à 12 personnes pour ne pas déranger, affichent complet des mois à l’avance. Un gîte “Castor & Nature” a même ouvert ses portes en 2024, générant des revenus pour la commune — et changeant le regard des habitants sur l’animal.
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Les scientifiques saluent aussi un effet “climatique”. Les zones humides créées par les castors stockent le carbone, rafraîchissent l’air en été, et limitent l’érosion des berges — un atout majeur face aux sécheresses récurrentes et aux crues soudaines. En 2025, la Région Bretagne intègre officiellement le castor dans son Plan climat-biodiversité, comme “solution fondée sur la nature”.
Le plus étonnant ? Le castor est revenu tout seul dans certains secteurs. En 2024, une femelle et ses petits sont observés sur l’Ellé, dans le Morbihan — à plus de 100 km des sites de lâcher. Signe que les corridors écologiques bretons, restaurés depuis les années 2000, fonctionnent. Le castor voyage, s’installe, se reproduit — sans aide humaine.
En 2025, la population bretonne est estimée à 80 individus, avec un taux de croissance annuel de 25 %. Si rien ne change, la Bretagne pourrait héberger 500 castors d’ici 2035 — un seuil jugé viable pour l’espèce. Aucun prélèvement n’est envisagé : le castor reste strictement protégé par la loi.
Le retour du castor en Bretagne n’est pas un conte de fées — c’est une leçon de pragmatisme écologique. Il montre qu’avec de la science, de la médiation, et du respect, l’homme et la nature sauvage peuvent coexister — et même s’enrichir mutuellement. En Bretagne, le castor n’est plus un intrus. Il est redevenu un habitant — discret, travailleur, et indispensable. Et c’est toute la région qui en profite.