Autre controverse : les disparités régionales de gestion. Alors que les Vosges et le Jura bénéficient de programmes de suivi renforcés (pièges photographiques, colliers GPS, patrouilles de médiation), le Massif central — où une vingtaine de lynx se sont installés naturellement depuis 2020 — manque cruellement de moyens. Résultat : les conflits y explosent, sans structure de dialogue ni dispositif de protection des troupeaux (chiens de protection, enclos nocturnes). L’État promet un plan “Lynx 2025-2030” doté de 5 millions d’euros, mais les élus locaux réclament des actions immédiates.
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Les naturalistes, eux, s’alarment de la fragmentation génétique. Les populations de lynx en France restent isolées les unes des autres — ce qui augmente les risques de consanguinité. Un projet de “corridor écologique” entre le Jura et les Alpes, via la Bresse et le Revermont, est à l’étude, mais se heurte à l’opposition des agriculteurs et des promoteurs immobiliers. En 2025, seuls 3 individus ont réussi à traverser naturellement cette barrière humaine.
Enfin, la question de la légitimité du lynx divise. Pour certains, il est un symbole de la reconquête de la nature sauvage, un atout pour l’écotourisme (les “sentiers du lynx” attirent chaque année des milliers de randonneurs dans les Vosges). Pour d’autres, il incarne une “ingérence écologiste” dans un monde rural déjà fragilisé. Le débat s’est politisé : en 2024, une proposition de loi visant à autoriser l’abattage “préventif” de lynx en zone d’élevage a été rejetée de justesse à l’Assemblée nationale.
En 2025, le bilan est donc mitigé : le lynx boréal est un succès de conservation, mais un échec de cohabitation. Sa pérennité dépendra de notre capacité à concilier écologie, économie et équité territoriale. Comme le rappelle le biologiste Jean-Marc Linares (MNHN) : “Le lynx n’est pas le problème. Il est le révélateur de nos contradictions. Le vrai défi, ce n’est pas de le chasser — c’est de réapprendre à vivre avec lui.”
